Nizan, Paul (1905-1940)
Contents |
Biographie
Années de jeunesse et de formation
Paul Nizan est le fils d’un ingénieur des chemins de fer et le petits-fils d'un ouvrier. Son appartenance à la petite bourgeoisie sera un sentiment difficile pour lui, comme il ressort du portrait qu'il fait de son père dans Antoine Bloyé . Il effectue ses études secondaires au lycée de Périgueux, où il est remarqué pour ses talents scolaires, puis au lycée Henri-IV, et ses études supérieures (hypokhâgne et khâgne) au Lycée Louis-le-Grand, où il a pour camarade Jean-Paul Sartre, qui devient rapidement son meilleur ami{{'}}. Reçu à l’École normale supérieure en 1924, il se lie aussi d'amitié avec Raymond Aron. Sartre se souviendra plus tard de Nizan comme d'un beau jeune homme, toujours bien habillé et plaisant aux femmes : {{citation}}. Les deux amis passent leur scolarité à travailler ensemble, à refaire le monde au bistro et à marcher dans Paris, si bien que Sartre note ironiquement que tout le monde les confondait, comme par exemple Léon Brunschvicg, qui le félicita pour Les Chiens de garde, ouvrage de Nizan.
Sur le plan politique, Paul Nizan cherche sa voie. Arrière-arrière-petit-fils d'un royaliste fusillé pendant la Révolution française, il s'inscrit aux Camelots du Roy, les jeunes de l'Action française. Il participe en 1925 au Faisceau de Georges Valois, premier parti fasciste français aux accents syndicalistes-révolutionnaires. Il s'intéresse à la prise de pouvoir de Benito Mussolini en Italie, porte parfois la chemise du mouvement et invite un des économistes du groupe Le Faisceau à l’École normale pour le présenter aux élèves socialistes (Mussolini étant un ancien socialiste, l'idée existe d'une parenté entre fascisme et socialisme au moment de son arrivée au pouvoir), mais la réunion tourne mal{{refsou}}. En cette année 1924, il lit également Lénine, qu'il emprunte à la bibliothèque de l’École, et dont le programme lui semble moins fantaisiste. Georges Valois lui-même dissout très rapidement son groupe en considérant s'être trompé sur les vertus sociales du fascisme. La même année, Nizan voyage en Italie, alors qu'il s'est déjà rapproché du communisme, et ses lettres à sa fiancée Henriette Alphen montrent surtout son intérêt pour la résistance des communistes face au fascisme.
En 1926-1927, indécis politiquement et en proie à une dépression, il se rend comme précepteur à Aden (Yémen).
L'intellectuel engagé
À son retour, il adhère au Parti communiste et épouse Henriette Alphen (1907-1993), une cousine de Claude Lévi-Strauss. Ils auront deux enfants, Anne-Marie (1928), future épouse d'Olivier Todd, et Patrick (1930). Il passe son Diplôme d'études supérieures avec un mémoire sur {{citation}}, puis traduit avec Sartre la Psychopathologique générale de Karl Jaspers. Sa réputation grandit dans le milieu universitaire. Il participe notamment à la Revue marxiste et à Bifur.
En 1929, il est reçu à l'agrégation de philosophie. Il fait son service militaire en 1930, puis l'Université réclame ses services et l'envoie comme professeur à Bourg-en-Bresse.
La publication en 1931 de son premier ouvrage, Aden Arabie (qui débute par les deux phrases devenues célèbres : « J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie. ») lui permet de se faire un nom dans le milieu littéraire et intellectuel.
Il est nommé professeur de philosophie au lycée Lalande de Bourg-en-Bresse, dont il brossera le tableau dans Présentation d'une ville. Nizan se présente aux élections législatives françaises de 1932 (dans la circonscription de Bresse rurale) comme candidat du parti communiste et recueille 2,7 % des voix. La même année, il publie Les Chiens de garde, réflexion sur le rôle temporel de la philosophie et pamphlet contre ses anciens maîtres, en particulier Henri Bergson et Léon Brunschvicg. En 1933, il publie Antoine Bloyé, où il évoque la « trahison de classe » (comment un homme en vient à « trahir » son groupe d'origine en gravissant les échelons sociaux). Ce livre est considéré par la critique comme le premier roman français relevant du « réalisme socialiste ». La même année, il participe au lancement de Commune, revue de l’Association des écrivains et artistes révolutionnaires (A.E.A.R.), à laquelle collaborent Henri Barbusse, André Gide, Romain Rolland, Paul Vaillant-Couturier et Louis Aragon.
Il traduit également coup sur coup, toujours en 1933, L'Amérique tragique de Dreiser et Les Soviets dans les affaires mondiales de Fisher. Le premier livre analyse la situation des Etats-Unis pendant la crise financière, et appelle à imiter l'URSS pour s'en sortir ; le second fait le récit des relations internationales de l'URSS depuis la paix de Brest-Litovsk jusqu'à la victoire de Staline sur Trotsky.
En 1934-1935, Nizan et son épouse Henriette séjournent un an en URSS ; fréquentant surtout les apparatchiks, ils ne croient pas à la réalité des famines soviétiques ni du Goulag dénoncé par David Rousset. Nizan participe au premier congrès de l’Union des écrivains soviétiques, et est également chargé d’organiser le séjour d’écrivains amis, tels André Malraux (avec qui il devient très lié), Louis Aragon ou Romain Rolland.
Ses publications se succèdent durant les années suivantes : Le Cheval de Troie, La Conspiration (prix Interallié) ainsi que les contributions à différentes revues et journaux d'obédience communiste : il écrit dans L'Humanité entre 1935 et 1937, puis dans le quotidien Ce soir entre 1937 et 1939. Il rédige notamment des articles sur la politique étrangère et des critiques littéraires.
Rupture avec le PCF et mort lors de la bataille de Dunkerque
En {{Date}}, il rompt avec le PCF à propos de la signature du pacte germano-soviétique. Son motif n'est pas un jugement moral contre l'URSS, il reproche au contraire au PCF d'avoir manqué de cynisme : {{Citation}}
Le {{Date de décès}}, il est tué au château de Cocove à Recques-sur-Hem, au début de la Seconde Guerre mondiale, lors de l'offensive allemande contre Dunkerque. Son dernier manuscrit n’a pas été retrouvé.
Paul Nizan est enterré à la Nécropole nationale française de la Targette à Neuville-Saint-Vaast (carré B, rangée 9, tombe {{n°}}).