Navarre, Yves (1940-1994)
Biographie
Après des études d'espagnol, d'anglais et de lettres modernes à l'Université de Lille, Yves Navarre est diplômé de l'École des hautes études commerciales du Nord (EDHEC), promotion 1964. Durant les premières années de sa vie professionnelle, Yves Navarre travaille dans la publicité comme concepteur-rédacteur, notamment à Publicis. Il devient même directeur de création chez BBDO (1969-1971) ; il y engage un jeune rédacteur qui fera son chemin, Thierry Ardisson.
Navarre commence à publier en 1971, initiant une prolifique carrière avec Lady Black, dont le personnage principal se travestit à l'occasion (c'est Jean-Louis Bory qui recommande son manuscrit à Flammarion).
Les Loukoums, histoire d'une maladie frappant certaines personnes vivant à New York, le fait connaître en 1973.
Il enchaîne alors les parutions, souvent autour du thème de l'amour entre deux hommes (Le Petit Galopin de nos corps, 1977 ; Portrait de Julien devant la fenêtre, 1979).
Il s'essaie également au théâtre avec des pièces comme Il pleut, si on tuait papa-maman, Dialogue de sourdes, La Guerre des piscines, Lucienne de Carpentras (où l’on retrouve l’un des personnages principaux des Loukoums, Lucy Balfour) ou encore Les Dernières Clientes.
Son roman Le Jardin d'acclimatation, histoire d'un jeune homme de bonne famille envoyé à l'internement et à la lobotomie parce qu'homosexuel, reçoit le prix Goncourt en 1980 (le prix couronne en fait l'ensemble de son œuvre). Quelques années plus tard, une autre distinction littéraire, le prix 30 millions d'amis, récompense son roman Une vie de chat (Albin Michel, 1986).
Navarre devient le porte-parole de François Mitterrand pour les homosexuels en 1981 et 1989, mais il se sent incompris comme romancier et snobé par le milieu littéraire parisien.
Il part donc vivre, de 1990 à 1993, à Montréal (Québec). Il y situe son roman Ce sont amis que vent emporte (1991), dans lequel un couple d'artistes (Roch et David, l'un sculpteur, l'autre danseur) luttent contre le sida.
Réalisant bientôt que le Canada n'est pas la « terre promise » qu'il espérait, l'écrivain rentre à Paris et y retrouve les problèmes qui l'avaient incité à s'expatrier. Accablé de soucis (entre autres, financiers, car ses droits d'auteur, depuis longtemps sa seule ressource, sont devenus très modestes), complètement déprimé, il se suicide aux barbituriques le 24 janvier 1994. Le titre d'un dernier recueil de nouvelles (publié à titre posthume, en 2006), Avant que tout me devienne insupportable résume bien l'état d'esprit dans lequel il a commis son geste.
Il avait écrit, dans Biographie, qu'il sortirait « de la gueule du loup par la gorge du loup ». Il présumait de ses forces.
Le fonds d'archives d'Yves Navarre est conservé au centre d'archives de Montréal de Bibliothèque et Archives nationales du Québec.