Welles, Orson (1915-1985)
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Biographie
Jeunesse
Son père, Richard Heard Welles, est un industriel dilettante et un grand voyageur ; sa mère, Béatrice Welles née Ives, est pianiste. Le fils les décrit ainsi : « Mon père était un bon vivant de l'époque édouardienne qui aimait se dire inventeur. Il était généreux et tolérant, adoré de tous ses amis. Je lui dois une enfance privilégiée et l'amour des voyages. Ma mère était une femme d'une beauté mémorable, elle s'occupait de politique, était une championne de tir au fusil, ainsi qu'une pianiste de concert très douée. Je tiens d'elle l'amour de la musique et de l'éloquence sans lesquels aucun être humain n'est complet».
Le jeune Orson grandit dans une ambiance raffinée et cultivée avec une touche d'excentricité. Les témoignages sur sa précocité abondent : il sait lire à deux ans, apprend à jouer du piano à trois ans et met en scène du Shakespeare à sept ans : en effet, la légende, difficile à démêler de la réalité, veut qu'il ait été un enfant prodige et qu'il ait joué Le Roi Lear tout seul à l'âge de sept ans et accompli d'autres exploits avant cela. Ces « exploits » sont désormais connus : il fit à trois ans une apparition dans Samson et Dalila à l'Opéra de Chicago, puis plus tard dans Madame Butterfly.
En 1919, ses parents se séparent et Orson suit sa mère à Chicago. À dix ans, il interprète Peter Rabbit dans les locaux du centre commercial Marshall Field's à Chicago. Par la suite, le journal local lui consacre un article titré : « Dessinateur, acteur, poète ; il n'a que dix ans ». Ses aptitudes et sa passion pour le monde du spectacle ne s'arrêtent pas là : il se veut également décorateur, metteur-en-scène et surtout comédien et ce qu'il préfère avant tout c'est le transformisme et les postiches.
Côté scolarité, il entre comme interne à dix ans dans une école située à Madison (Wisconsin), où il monte une adaptation théâtrale de L'Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde. En 1926, il intègre la Todd School for Boys, un établissement ouvert aux pratiques artistiques situé à Woodstock (Illinois) et dirigé par Roger Hill, à qui Welles rendit hommage par la suite. En effet, durant ses quatre années passées à la Todd School, il approfondit son goût pour la tragédie et la poésie classique, mais aussi pour l’illusionnisme et la magie. Très attaché à cette école, il y retournera durant l'été 1934 pour y monter un festival de théâtre qui donnera lieu à son premier ouvrage, Everybody's Shakespeare..
Deux événements personnels viennent ternir l'enfance et l'adolescence d'Orson : il perd sa mère, âgée seulement de quarante ans, le {{date}}, suivie six ans plus tard par la mort de son père. Orphelin à quinze ans, il est pris en charge par le pédiatre Maurice Bernstein (qu'Everett Sloane incarnera plus tard dans un rôle transposé pour Citizen Kane), un ami de longue date de ses parents qui va continuer à parfaire son éducation : il avait discerné en Orson, dès son plus jeune âge, un goût hors du commun pour le théâtre et l'illusion, lui offrant même une lanterne magique et un théâtre de marionnettes.
En 1930, encore étudiant à la Todd School, Orson gagne le prix de la meilleure mise en scène estudiantine avec son Jules César, prix décerné par l'Association dramatique de Chicago. Bernstein lui propose de l'inscrire à Harvard puis le présente à Boris Anisfeld du Chicago Art Institute qui se montre impressionné par ses dessins, et Welles demande un congé sabbatique pour faire un « tour d'Europe ».
{{lang}} (1930–1933)
Il choisit de partir durant l'été 1930 pour l'Irlande, afin d'étancher sa soif de peinture – de fait, Welles dessina toute sa vie. Il parcourt le pays avec une roulotte tractée par une mule , fait un crochet par les Îles d'Aran, se rend à Dublin et de là, à Paris où le magicien Harry Houdini l'initie à la magie et à la prestidigitation. Âgé de seize ans et sans un sou, il revient à Dublin et se présente comme « vedette de théâtre new-yorkaise » à Hilton Edwards et Micheál Mac Liammóir, directeurs du Gate Theatre : Orson se montre très convaincant, car il s'est habilement grimé, et sa voix chaude et grave le fait passer pour plus âgé qu'il n'est. Grâce à cette mystification, il est enrôlé et demeure à Dublin, où il approfondit son expérience de la scène : « Je commençai en jouant les premiers rôles en vedette. Les petits rôles vinrent plus tard. ». Le Gate, où débuta également James Mason, révéla Welles à son « démon du théâtre ». Il interpréta le rôle du duc Karl Alexandre dans une adaptation du Juif Süss, mais surtout les rôles titres dans Hamlet, Richard III, King John, Timon d'Athènes, soit une vingtaine de pièces, rencontrant pour la première fois un vrai public. Par intermittence, il est également régisseur son et lumières pour l'Abbey Theatre, le concurrent plus conservateur du Gate.
Aficionado
Ambitieux, Welles décide de partir à la conquête des théâtres londoniens, mais son permis de travail lui est refusé et il retourne à Dublin. Entre deux saisons théâtrales, il effectue un séjour à Séville et se fait passer pour un auteur de romans policiers. Il déclara à ce propos : « J'habitais dans le quartier de Triana. J'écrivais des romans policiers, ce qui me prenait deux jours par semaine et me rapportait trois cents dollars. Avec cet argent, j'étais un grand seigneur à Séville ». C'est également durant cette période qu'il se prend de passion pour la corrida. Après avoir découvert l'Andalousie à dix-sept ans, il pratique la tauromachie en tant que Aficionado practico, puis la corrida en tant que novillero. Ce sera une passion de toute une vie (voir plus loin).
En 1932, il réalise un premier exercice cinématographique, un essai de dix minutes, mettant en images le Docteur Jekyll et Mister Hyde, mais d'après McBride, « il ne s'agit que d'un travail amateur et chaotique, dans lequel Welles et quelques amis dublinois, s'amusent ». En 1934, il décide de retourner aux États-Unis.
New York (1934–1938)
En 1934, après cette immersion dans le théâtre, il retourne aux États-Unis, non sans amertume et quelque peu désœuvré. Le jeune homme possède alors une solide culture littéraire, ainsi qu'une bonne maîtrise des techniques de mise en scène. Pourtant les années 1933-1934 apportent nombre de changements, d'abord par la scène puis par son mariage.
Off-Broadway
Alors qu'il peine à trouver des rôles à sa mesure, que ses propres pièces comme The Marching Song sont refusées et que les États-Unis s'enfoncent dans la crise, Welles produit, toujours grâce à Roger Hill, une série d'ouvrages éducatifs illustrés intitulée Everybody's Shakespeare, qui lui permet de visiter l'Afrique du Nord et de là, de ramener des centaines de dessins. Entre temps, il rencontre Thornton Wilder qui lui ouvre les portes de spectacles produits off-Broadway : c'est ainsi qu'il commence à jouer dans la troupe de Katharine Cornell, et c'est durant son interprétation dans Roméo et Juliette qu'il fut remarqué par John Houseman.
La chance lui sourit également quand Roger Hill, directeur de la Todd School, le contacte pour lui demander d'organiser un festival théâtral (Summer Festival of Drama) durant l'été. Il réussit à inviter Mac Liammóir et Edwards, les directeurs du Gate. Au cours des répétitions, il rencontre une jeune actrice en devenir, Virginia Nicholson (1916-1996), qu'il épouse quatre mois plus tard — en mars 1938, le couple aura une fille prénommée Chris, mais divorcera en 1939. Virginia se remariera avec le scénariste Charles Lederer l'année suivante.
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Dans l’intervalle, Welles tourne son premier film, {{lang}} qui est un court-métrage muet d'une durée de huit minutes et par lequel, selon ses termes, il {{citation}}. Welles y interprète le rôle d'un homme en chapeau et grimé, tentant de descendre d'un bateau puis jouant du piano, tandis qu'une femme âgée le menace. Le montage « vigoureux et débridé », les angles et la lumière, révèlent un style très marqué par le cinéma expressionniste et l'esprit surréaliste. Virginia y campe la vieille dame et l'agent de police, son camarade de théâtre William Vance interprète un indien, le tout ponctué de plans de cloches d'église et de croix. Une séquence montre la main de Welles en train de dessiner. Restauré et conservé à la Bibliothèque du Congrès, ce premier opus ne détourne pas vraiment Welles de sa passion pour le théâtre.
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Au vu de ses performances avec Cornell, le producteur et directeur de théâtre John Houseman lui offre de travailler avec lui, dans le cadre du {{lang}}, un programme culturel issu du New Deal et opérationnel en septembre 1935. En avril 1936, il fit sensation en montant sur les planches d'un théâtre d’Harlem une adaptation très originale du Macbeth de Shakespeare, transposant sur scène la vieille Écosse, brumeuse et froide, en une ambiance caraïbe inspirée de l'histoire moderne d'Haïti, le tout interprété par des acteurs noirs. L'histoire se déroulait à l'époque du roi Henri {{Ier}}, et les sorcières devinrent des prêtresses vaudou. Il monta également le Faust de Marlowe dans une ambiance tamisée et mortifère. Après une adaptation dUn chapeau de paille d'Italie (Horse Eats Hat) d'Eugène Labiche qui vit apparaître Joseph Cotten par la première fois, Houseman et Welles connurent en juin 1937 un véritable succès, doublé d'un autre scandale, avec une sorte de satire de la vie politique américaine en forme d'opéra composé par Marc Blitzstein et intitulée The Craddle will rock. De nombreux opposants politiques, ainsi que des ennemis du {{lang}}, firent pression à Washington et obtinrent que la police donne l'ordre de fermer les portes du théâtre. Houseman et Welles décidèrent alors de jouer l'opéra dans la rue, où 600 personnes s'étaient rassemblées.
Les deux hommes démissionnent et fondent à la fin de l'année 1937 le Mercury Theatre, essentiellement pour servir le répertoire shakespearien. Leur première production fut Jules César dans une mise en scène inspirée du fascisme mussolinien.
{{lang}}
Deuxième court-métrage de Welles, {{lang}} fut produit par Mercury Productions et s'inscrit donc dans le cadre des représentations théâtrales engagées avec Houseman. L'origine du film n'est pas une œuvre de Shakespeare, mais une farce écrite par William Gillette. Tourné au cours du l'été 1938 dans les environs de New York et d'une durée de 40 minutes, ce film muet devait faire partie intégrante du spectacle, servant et de prologue et d'entractes. Pour des raisons multiples, il ne fut pas projeté lors de l'avant-première prévue au festival du Stony Creek Summer Theater. On voyait dans le rôle-titre Joseph Cotten déambuler sur les toits de New York, mais aussi Virginia Nicholson, Welles et Marc Blitzstein.
Débuts en radiophonie
Disque de l'émission du 30 octobre 1938.
Parallèlement à son activité théâtrale, Welles fit dès 1935 ses débuts à la radio, dont l'émission {{lang}}, où sa voix chaude et grave séduit les auditeurs : durant quatre ans, il collabore à une quinzaine d'émissions par semaine{{,}}. La chaîne CBS l'engagea pour réaliser des adaptations radiophoniques d'œuvres littéraires, avec ce qui constituera plus tard la troupe du {{lang}} notamment Joseph Cotten, Everett Sloane, Agnes Moorehead, Dolores del Río, Ray Collins, et George Coulouris. L'émission hebdomadaire, intitulée {{lang}}, met en ondes de nombreux romans, dont La Splendeur des Amberson — qui sera plus tard son deuxième long-métrage —, mais aussi L'île au trésor de Robert Louis Stevenson, {{lang}} de Charlotte Brontë, Jules César de Shakespeare et Le Tour du monde en quatre-vingts jours de Jules Verne. L'expérience dura vingt et un mois.
Durant la soirée du lundi 30 octobre 1938, veille d'Halloween, CBS diffuse une adaptation de La Guerre des mondes de Herbert George Wells. Cette émission, du fait de sa mise en onde très réaliste (Welles se faisait passer pour un présentateur de CBS interrompant le programme), aurait, selon une thèse très répandue, mais aujourd'hui remise en question, effrayé une bonne partie de la Côte Est des États-Unis qui aurait cru à l'invasion du pays par des Martiens. Les circonstances de cette émission furent pourtant moins « glorieuses » que ses conséquences. Les standards de CBS, mais aussi des commissariats furent submergés d'appels de personnes prétendant avoir aperçu des Martiens. La panique fut relayée durant une semaine dans la presse. Rétrospectivement, l'ampleur de la panique aurait été, selon certains auteurs, considérablement exagérée au fil des années, entre autres par Welles lui-même. Cette émission permet cependant à Welles de devenir célèbre dans tout le pays du jour au lendemain, ce qui lui ouvre les portes de Hollywood, où il lui est proposé un contrat en or.
Hollywood (1939–1947)
Tandis que Welles continuait à travailler avec Houseman pour CBS dans une émission identique, mais désormais rebaptisée {{lang}} (du nom de la Campbell Soup Company, sponsor du show), il fut contacté au cours de l'année 1939 par le tout nouveau président de la RKO Radio Pictures, George J. Schaefer (1888-1981) dont l'ambition était de faire des films de qualité. Le magazine {{lang}} venait de désigner Welles comme le « nouveau Max Reinhardt ». Et le 22 juin, il débarquait sur la Côte Ouest. Contrairement à la légende, ce contrat des studios ne lui laissait pas « une entière liberté », mais prévoyait tout de même qu'il pouvait être à la fois scénariste et réalisateur, mais aussi coproducteur via sa société Mercury Production, un statut en vérité assez inhabituel, mais la RKO restant le distributeur, son droit de veto était considérable notamment sur le choix des acteurs et sur le montant des sommes avancées. Par ailleurs, on lui demandait un film par an sur une durée de cinq ans, en échange de 25 % des bénéfices et {{unité}} d'avance, avec une liberté sur le choix de la musique et même du montage, chose rarement vue à Hollywood.
Divorcé, puis installé à Brentwood (Los Angeles) et entouré de secrétaires, Welles travaille d'abord à l'adaptation du roman de Joseph Conrad, Au cœur des ténèbres ({{lang}}) et propose l'utilisation d'une caméra subjective. La RKO refuse pour cause de dépassement de budget prévisionnel, le projet, pourtant scénarisé, n'aboutit pas. À peine le Conrad refusé, Welles propose une adaptation cette fois de Cecil Day-Lewis, un polar politique intitulé {{lang}}, qui raconte l'histoire d'un femme détective qui enquête sur un mystérieux personnage vivant incognito et qui s'avère être un futur despote doublé d'un aviateur excentrique (visiblement inspiré d'Howard Hughes). Le choix de Lucille Ball pour le rôle-titre déplut aux studios, Carole Lombard ayant décliné l'offre. Côté vie privée, Welles noua une relation avec Dolores del Río ; en 1940, il rompt son association avec John Houseman.
{{lang}}
Orson Welles dans {{lang}}.
Un an après son arrivée à Hollywood, Orson Welles, associé au scénariste Herman Mankiewicz (frère du cinéaste Joseph L. Mankiewicz), écrit le scénario de {{lang}} et s'inspire en partie de la vie du magnat de la presse William Randolph Hearst. Toute la troupe du Mercury est intégrée dans la distribution. Le cinéaste a enfin obtenu le contrôle total du tournage, car il désire maintenir secret le sujet de son film. Les producteurs essaient de s'en mêler en débarquant à l'improviste sur le plateau, mais ils n'y trouvent que les techniciens et les acteurs en train de jouer au baseball, sur l'ordre du réalisateur rendu méfiant.
Le tournage se déroula du 30 juillet au 23 octobre 1940. Une fois le montage et la postproduction achevés durant l'hiver, Orson Welles participa à de nombreuses manifestations promotionnelles où on ne lui parlait que du parallèle entre le personnage de Charles Foster Kane et Hearst, et de la réaction de ce dernier qui venait d'engager une campagne de dénigrement par l'intermédiaire de ses propres journaux. Lassé, Welles déclara : {{citation}}. Les choses s'envenimèrent à tel point qu'au sein de l'état-major de la RKO, il fut question de confisquer le négatif du film ; les dirigeants décidèrent malgré tout de lâcher du lest non sans avoir fait passer une copie à Hearst, et Welles, s'estimant trahi, menaça publiquement la société d'un procès en rupture de contrat, en son nom et en celui du {{lang}} : le film avait coûté 800000 dollars. Sa santé s’altéra tant que son médecin l'envoya prendre du repos dans une clinique de Palm Springs. Malgré la campagne de dénigrement orchestrée par Hearst qui dure jusqu'en avril 1941, le film sort en salles, avec retard, le {{1er}} mai et d'abord au New York Palace. La critique est unanimement positive : le film apparaît comme une révolution du point de vue de la technique cinématographique et de la structure du récit. Plus tard, Welles dira que, pour la réalisation, il s'était inspiré du Roman d'un tricheur de Sacha Guitry quant à certains effets stylistiques (flashbacks, fondus, caméra subjective, voix-off, etc.), effets que l'on retrouve dans les films suivants. Toujours est-il que si le public ne fut pas au rendez-vous, Welles décrocha tout de même le premier Oscar du meilleur scénario original et qu'il partagea avec Herman Mankiewicz.
La Splendeur des Amberson
La Splendeur des Amberson]]
Pour échapper au monde d'Hollywood, Welles s'accorda quelques semaines de mise en scène sur les planches où il monta une adaptation de Native Son de Richard Wright. Puis il s'attela à un nouveau script inspiré du roman La Splendeur des Amberson ({{lang}}) de Booth Tarkington, qu'il avait en octobre 1939 déjà transposé à la radio.
Le tournage se déroula du 28 octobre 1941 au 22 janvier 1942 : la destruction de Pearl Harbor arriva entre-temps et le film se termina dans un climat oppressant, surtout que Welles était déjà sur d'autres projets. Pour ce deuxième film, le studio reconsidéra en effet son contrat, réduisant sa marge de manœuvre en termes de montage final : n'y ayant pas accès, Welles partit au Brésil pour tourner dans un premier temps un reportage sur le carnaval de Rio. Là-bas, il apprit que Schaefer était viré (Welles perdait son protecteur) et qu'à la suite de deux pré-projections négatives en termes de retour, la RKO amputait le film de près de 43 minutes, lesquelles ne seront jamais retrouvées. La RKO fit également tourner une autre fin plus « moralement acceptable » par l'assistant-réalisateur Freddie Fleck et le monteur Robert Wise qui s'était déjà illustré sur Citizen Kane. Par ailleurs, mécontent que sa partition soit également amputée, Bernard Herrmann refusa que son nom soit porté au générique qui est l'un des premiers aux États-Unis à être récité à haute voix, se concluant par la marque finale devenue mythique : {{lang}} (Mon nom est Orson Welles, selon l'habitude des présentateurs radio). La première eut lieu le 13 août 1942 et le film, qui n'engrangea que 620000 dollars, fut sur la liste de quatre Oscars, mais sans succès.
Conflits avec la RKO
{{article détaillé}} Combat de taureaux le dimanche, gravure extraite de l'album américain Our Sister Republic - Mexico (1870).
Commencé en même temps que La Splendeur des Amberson, le tournage du Voyage au pays de la peur ({{lang}}) place Welles dans une position délicate : il est sur ce dernier à la fois acteur et producteur, mais dans son contrat avec la RKO, il est initialement prévu qu'il le dirigerait. Visiblement plus intéressé par La Splendeur des Amberson, Welles froisse quelque peu les studios en quittant le plateau. Par ailleurs, et sur les instances de Nelson Rockefeller, il met en chantier un troisième projet durant cet automne 1941 : intitulé d'abord {{lang}} et bientôt rebaptisé {{lang}}, regroupant quatre épisodes documentaires, Welles y brosse la vie des Américains sur les deux continents. Durant l'été 1941, et dans le cadre de ce travail de commande visant à rapprocher les peuples américains menacés par la guerre, Welles prend contact avec Duke Ellington et lui commande une suite musicale pour un portrait de Louis Armstrong qui ne se fit jamais. En septembre, Norman Foster est dépêché à Mexico pour tourner l'épisode intitulé {{lang}}, l'histoire d'un taureau et d'un garçon, lequel sera intégré plus tard au projet de documentaire.
De février à août 1942, Welles parcourt le Brésil en quête d'images pour deux épisodes : {{lang}} (l'histoire de la samba) et {{lang}} (quatre pécheurs brésiliens sur un radeau). On peut supposer aussi qu'une telle distance permit à la RKO d'en profiter : « J'étais en Amérique du Sud et attendais les rushes de Voyage au pays de la peur ; c'est alors qu'un galopin de la RKO, ayant reçu l'approbation bienveillante d'un couple de vice-présidents et des censeurs du studio, se permit de monter le film. Le résultat fut heureusement présenté par une nuit noire, alors que personne ne regardait. » dira plus tard Welles. Les raisons pour lesquelles {{lang}} restera inachevé sont multiples : d'abord la direction de la RKO change, après le départ de Schaefer, c'est Rockefeller qui se retire. Et puis il y a le montage de La Splendeur des Amberson qui rend furieux Welles. Par la suite, le tournage est annulé et les bobines dispaissent. L'année 1943 marque un retour à l'optimisme : le 7 septembre 1943, il épouse la star Rita Hayworth, ils ont une fille, Rebecca, en 1944, mais divorcent en 1948. Invité par Franklin Roosevelt à participer à l'effort de guerre, il propose une série de conférences un peu partout aux États-Unis, dont certaines sont publiées dans le New Farmer Almanac et le {{lang}} ou diffusées sur CBS, et ce, durant toute la guerre. CBS programma en 1942-43 : {{lang}}, une série radiophonique de 13 épisodes qui valorise l'armée de l'air américaine, commandée par Lockheed-Vega, mais écrite, réalisée et récitée par Welles ; puis Hello Americans qui consiste en 12 épisodes enregistrés dans différents pays du continent américain.
Début 1944, Welles devient une vedette de cinéma avec {{lang}} de Robert Stevenson, qui est par ailleurs une adaptation de la pièce radiophonique jouée par {{lang}}. Welles y incarne le premier rôle et connaît un beau succès commercial.
Le Criminel
Welles s'investit à la fin de l'année 1943 dans le théâtre aux armées, produisant entre autres des tours de magie. La revue est baptisée {{lang}} et participa notamment au film à sketch {{lang}} ({{lang}}), dans duquel il découpe en morceaux Marlene Dietrich et où il se qualifie de « magicien amateur ». Cette même année, il écrivit un scénario intitulé Monsieur Verdoux, inspiré d'un fait divers français, l'affaire Landru, et pour lequel il pressentait Charlie Chaplin pour le rôle titre : Chaplin n'ayant jamais été dirigé par personne le réécrivit après lecture et le transforma selon ses besoins, y incluant notamment une critique socio-économique, et, pour dédommager Welles, lui proposa 5000 dollars, ainsi que sa présence au générique.
Welles revint derrière la caméra seulement à la fin à l'automne 1945 avec Le Criminel ({{lang}}) : Sam Spiegel et la RKO, plus réticente que jamais, lui proposèrent de réaliser ce film, à condition de prendre le scénario de Anthony Veiller sans modification ; John Huston qui n'est pas crédité aida Welles du mieux qu'il put et les deux hommes devinrent amis. Welles expédia la mise en scène avec dix jours d'avance sur la date prévue et le film sortit le 25 mai 1946, puis connut un franc succès, mais fut considéré par Welles lui-même « comme étant son plus mauvais. Il n'y a rien de moi là-dedans. Je l'ai fait pour prouver que je pouvais tourner un film comme tout le monde. […] Les deux bobines tournées en Amérique du Sud étaient ce qu'il y a de mieux dans le film. Spiegel les a supprimées ». Welles y interprète un ancien nazi et c'est aussi le premier film à montrer des images de camps de concentration. Toutefois, l'année 1946 devait lui apporter une véritable satisfaction : tourner librement avec son épouse, Rita Hayworth.
La Dame de Shanghai
Il réalise cette année-là La Dame de Shanghai ({{lang}}) vaguement inspiré d'un roman de Sherwood King, et magnifié par la présence de Rita Hayworth — avec qui il est déjà en instance de divorce. Le public crie au scandale en voyant la rousse Rita, symbole du glamour hollywoodien, transformée en blonde platine aux cheveux courts, devenue à l'écran cynique et froide ; on boude le film pendant les projections tests, lesquelles n'emballent pas non plus la Columbia qui préfère retarder sa sortie au profit de Gilda, autre film avec Hayworth en vedette. Le film ne sort qu'en mai 1948. Le quatrième long-métrage de celui que la presse décrit déjà comme l'« enfant terrible d'Hollywood à l'étoile pâlissante » s'achève sur la séquence du palais des glaces, où Rita Hayworth et Everett Sloane, qui jouent un couple marié, s'entretuent dans un terrifiant vacarme de verre brisé, labyrinthe de miroirs dont peut s'échapper le personnage principal (et narrateur), Michael O'Hara, interprété par Welles.
Juste après le tournage, Welles revient au théâtre et donc à New York. Certaines séquences de La Dame de Shanghai sont utilisées par Welles pour sa pièce, {{lang}} d'après Jules Verne, dont l'adaptation filmique est envisagée par Michael Todd. Avec cette dispendieuse production théâtrale que le public boude, Welles connaît pour la première fois des ennuis d'argent.
{{lang}}
{{article détaillé}}
Durant l'été 1947, Herbert Yates, le président de Republic Pictures, un petit studio indépendant spécialisé dans le western et les séries B, accepte de financer son nouveau projet de film, l'adaptation du Macbeth de Shakespeare contre 200000 dollars, le dépassement devant être payé par {{lang}}, autrement dit Welles. Ce pari économique ne fut pas tenu : Orson Welles paye près de 100000 dollars en extra, tout en dissimulant la pauvreté des décors au milieu dans un brouillard artificiel, mais en tournant son film en seulement vingt et un jours. Le résultat est saisissant d'étrangeté et de mystère, restituant parfaitement {{citation}}. Sorti le {{1er}} octobre 1948, le film manque d'être présenté à la Mostra de Venise face à l{{'}}Hamlet de Laurence Olivier, puis disparait des écrans. Il sort en France en 1950 et André Bazin est l'un de ses plus ardents défenseurs, contribuant, avec Jean Cocteau, à faire venir « l'enfant prodigue » en Europe. En réalité, Welles sort totalement ruiné de cette expérience et le fisc américain lui réclame de fortes sommes. Dès la fin 1948, il embarque pour Cinecitta, où il travaille pour divers rôles, profitant ainsi de sa notoriété d'acteur.
Tour d'Europe (1949–1956)
Outre ses ennuis avec le fisc, Welles est désormais tombé en disgrâce auprès des producteurs américains, en particulier parce qu'il figure depuis novembre 1947 à la suite des recommandations de l'HUAAC sur la liste noire de la MPAA, laquelle refuse d'employer des artistes supposés être de tendance communiste. Paradoxalement, Welles n'avait jamais caché son aversion pour les fascismes et le stalinisme, entretenant même une correspondance entre autres avec Eisenstein. Victime collatérale du Maccartysme, Welles partit en Europe où il joua dans de nombreux films pour financer son nouveau projet shakespearien : {{lang}}.
Le Troisième Homme
Après Rome dont on peut retenir {{lang}} ({{lang}}) qui permit la rencontre avec Akim Tamiroff, puis après quelques projets parisiens avortés, Welles tourna surtout à Londres. Le film qui amorça la transformation d'Orson Welles en un véritable mythe en Europe fut celui où, entre ombre et brouillard, il n'apparaît que peu (comparé à Joseph Cotten) et qui ne connut pas non plus un énorme succès : adapté du roman éponyme de Graham Greene (également scénariste), Le Troisième Homme du Britannique Carol Reed reste pourtant un cas à part dans sa carrière d'acteur. Reed reconnut plus tard que Welles s'était particulièrement investi dans cette aventure qui les mena à Vienne, prodiguant même quelques conseils sur deux ou trois séquences, mais pas plus. Son personnage fit corps avec lui et Welles devint pour tous Harry Lime, « l'homme qui meurt deux fois » doublé d'un truand équivoque et fascinant.
La France
Le public français découvrit les premiers films de Welles bien entendu après la Libération. Jean-Paul Sartre fit alors l'éloge de Citizen Kane un an avant qu'il sorte en salles en juillet 1946. Plus tard, les jeunes critiques des Cahiers du cinéma se laissèrent également séduire, André Bazin en tête.
À New York pendant la guerre, Orson Welles avait assisté à une projection de La Femme du boulanger de Marcel Pagnol. Welles débarqua à Marseille en septembre 1946, et Pagnol raconta qu'il a vu surgir dans son bureau un géant qui s'est exclamé : « Je veux voir monsieur Raimu ! ». Mais Raimu venait juste de mourir, et Welles de fondre alors en larmes : « C'était le meilleur de nous tous ! », finit-il par dire, avant d'expliquer qu'il avait envisagé de faire appel à Raimu pour quelques projets de films. Entre Pagnol et Welles, ce fut l'amitié, ce dernier n'hésitant pas le à critiquer, disant par exemple de La Femme du boulanger qu'il est {{citation}}. Welles fit aussi la connaissance d'un collaborateur de Pagnol, le photographe de plateau Roger Corbeau, qui fut engagé sur Dossier secret et Le Procès. Quelques années plus tard, Welles est contacté par Sacha Guitry qui lui proposa le rôle de Benjamin Franklin dans Si Versailles m'était conté et celui de Hudson Lowe pour son Napoléon. Lorsque Bill Krohn s'entretint avec Welles à la fin des années 1970, celui-ci lui révéla qu'il avait forgé son style {{citation}}.
Londres
En 1951, le producteur indépendant Harry Allan Towers demande à Welles, alors installé entre Londres et l'Italie, de réaliser Tales from the Black Museum, une série radiophonique en 51 épisodes inspirés de faits divers réels tirés des dossiers de Scotland Yard et de la Metropolitan Police Service. Towers réussit à exporter ce programme sur l'ensemble des chaînes anglophones dans le monde. Aux États-Unis, il fut diffusé sur Mutual Broadcasting System durant l'année 1952. La scénarisation est signée Ira Marion et possède l'originalité de faire entendre à la fois le point-de-vue de la police et des criminels.
{{lang}}
Welles va mettre quatre ans à tourner {{lang}} ({{lang}}). Bien qu'inscrit au répertoire du {{lang}}, André Bazin situe le début de ce projet lorsque Welles se trouvait en Italie. Un séjour à Venise et une liaison avec Lea Padovani qui devait interpréter Desdémone, lui permettent de faire remonter le début du tournage à l'été 1948. Les cachets italiens de l'acteur (via Mercury Productions) servent à payer les premières séquences, puis ceux de Londres. Après une première audition décevante, il fait appel à Micheál MacLiammóir pour jouer Iago, puis Suzanne Cloutier pour Desdémone. L'équipe du film se trouve bientôt composée de différentes nationalités, car le tournage interrompu par les problèmes d'argent doit s'adapter à de nombreux changements de lieux. Ainsi, Welles utilise de nombreux plans extérieurs (Venise, Rome, Pérouse, Viterbe, Essaouira) en réalisant d'invisibles raccords, tissant son film de façon obstinée, et suivi tant bien que mal par son équipe, se retrouvant sans producteur italien (Michele Scalera dépose le bilan en 1950) et sauvé par Les Films Marceau, pour un budget total d'environ 6000000 lires et un montage qui comprend 2000 plans (contre 500 pour Citizen Kane). Le film conserve cependant la marque du réalisateur, qui affirme : {{citation}}. Sa réussite artistique est saluée par le Grand prix (ex-æquo) à Cannes en 1952, le film étant présenté sous pavillon marocain{{refnec}}.
Débuts à la télévision
Welles revint ensuite sur les planches et c'est au théâtre Édouard VII à Paris qu'il proposa une adaptation de sa propre pièce The Unthinking Lobster (Miracle à Hollywood), une fable satirique contre le système de production hollywoodien pour laquelle il tourna en guise de prélude le court-métrage The Miracle of St. Anne et recruta Eartha Kitt ; l'ensemble s'intitulait The Blessed and the Damned. La critique parisienne dont Le Monde salua les prouesses techniques, mais s'inquiéta du coût financier, aussi Welles remplaça le tout par du Musset et du Shakespeare, Eartha clôturant la soirée avec un récital de chanson puis le spectacle partit en tournée. Revenu à Londres, Welles finit enfin par y monter du Shakespeare grâce à l'aide de Laurence Olivier, puis participa au lancement de la chaîne BBC2 avec une adaptation du Marchand de Venise. En 1955, la BBC lui commande une série, The Orson Welles Sketchbook, six épisodes dans lesquels il raconte des anecdotes personnelles tout en dessinant. Dans la foulée, Associated-Rediffusion, une société de production londonienne, passe commande de treize téléfilms : Around The World with Orson Welles (ITA, 1956) est un « travels essays film », tourné à Londres, en France, en Espagne et qui comprenait : Le Pays basque, La Vie au Pays basque, Le Troisième Homme à Vienne, Saint-Germain-des-Prés, Les Pensionnaires de la Reine, Tauromachie en Espagne et enfin L'Affaire Dominici.
Pour la radio anglaise, il participa à une série en 52 épisodes, préquelle au Troisième homme et intitulée The Adventures of Harry Lime (BBC, 1951-52). Sur ce, il rencontra Peter Brook qui adapta avec lui King Lear (Le roi Lear) pour la télévision américaine ({{lang}}, 1953).
Dossier secret
Après des débuts remarqués à la télévision, il se lança totalement dans le projet d'un nouveau film, en partie inspiré de trois épisodes des Adventures of Harry Lime . Non seulement ce film eut deux titres (voire trois), mais aussi cinq versions en salle. L'histoire du tournage est aussi complexe que celle dOthello. {{Article détaillé}} Intitulé sur le script de départ Masquerade, puis Confidential Report (Dossier secret) et produit par le français Louis Dolivet (qui confisquera le montage), le tournage s'étala sur sept mois (1953-54), entre Ségovie, Madrid, Valladolid, Munich, Paris, la Côte d'Azur et le Château de Chillon. Arkadin, le personnage que joue Welles, prend sa source dans la vie du milliardaire Basil Zaharoff et l'homme chargé d’enquêter sur son passé est Lime, mais Welles le rebaptisa Van Stratten. La sortie du film prit deux ans de retard, car le montage entrepris par Welles dura presque toute l'année 1954, à cause surtout de la postsynchronisation. La première eut cependant lieu à Madrid en mars 1955 sous le titre Mister Arkadin, puis à Londres cinq mois plus tard et enfin Paris (juin 1956). La critique est partagée, mais Éric Rohmer compara alors Welles à Eisenstein.
Au début du tournage, Welles rencontre l'actrice italienne Paola Mori qu'il épousa en mai 1955 – ils eurent une fille, Beatrice Welles, née à la fin de la même année ; Welles quitta Paola en 1962 pour vivre avec Oja Kodar.
Intermède américain (1956–1959)
Welles devient Hank Quinlan dans La Soif du mal (1958).
Welles était déjà revenu à Broadway en 1954 pour un {{lang}} remarqué et d'ailleurs capté par CBS, mais c'est à Londres qu'il transposa pour la scène {{lang}}, le roman de Melville en 1955, mise en scène bientôt captée par la télévision anglaise : intitulée {{lang}}, le montage ne fut jamais achevé. Peu après, John Huston fut alors chargé de faire un film, à partir d'un scénario de Ray Bradbury : ce fut {{lang}}, où Welles jouait le Père Mapple, et qui revint donc après dix ans d'absence à Hollywood. Il participa à nombre d'adaptations shakespeariennes pour CBS et NBC, mais surtout, et contre toute attente, il réalisa un long-métrage.
En 1958, il se voit confier la réalisation de La Soif du mal ({{lang}}), d'après un petit roman noir, par les studios Universal. Dans des entretiens ultérieurs avec Peter Bogdanovich, Welles expliquera comment Charlton Heston, véritable star à l'époque, joua dans ce choix un rôle déterminant. Désirant la star pour le projet, Universal convoqua Heston, qui apprend que la distribution comprendra Janet Leigh dans le rôle de sa femme, et Orson Welles, dans le rôle du commissaire Quinlan. À la suite d'un malentendu, Heston comprit que « Welles va être le réalisateur du film », alors il déclara : « Si Welles est le réalisateur, je suis d'accord ». Contacté, Welles donne son accord pour un bout d'essai. Les producteurs visionnant tous les soirs les rushes, {{refnec}}. Hélas pour lui, une fois le film monté, le studio changea radicalement de position. Universal décida de faire remonter complètement le film par un autre réalisateur, de couper des scènes et {{refnec}}. Welles déclara : « L'humour que j'ai mis dans le film était inhabituel pour l'époque. Aujourd'hui, il s'est banalisé. Mais à l'époque, il a déplu aux pontes d'Universal ». Ce fut là son dernier film hollywoodien : on y retrouvait Akim Tamiroff et Marlene Dietrich, et un plan séquence inaugural mythique. Durant ce séjour, il tourne notamment dans Les Feux de l'été d'après William Faulkner où il décroche un rôle face à Paul Newman et travaille pour Desilu Productions, qui le contacte fin 1956 pour lancer une série, The Orson Welles Show, mais le projet est avorté. La chaîne NBC programmera The Fountain of Youth (La Fontaine de jouvence), seul épisode achevé et qui remporte un prestigieux Peabody Awards.
Retour en Europe
Avant de rentrer en Europe, Welles fait la connaissance à Mexico d'Oscar Dancigers, producteur entre autres de Luis Buñuel. Un nouveau projet émergea : adapter le Don Quichotte de Cervantès. Ce film ne fut jamais achevé, mais Welles tenta de le terminer toute sa vie durant (cf. plus loin). En 1961, la chaîne ABC programma Orson Welles and the Art of Bullfighting qu'il réalisa en Espagne : c'est vers cette époque qu'il s'installe à Madrid, mais Welles ne cesse d'aller et venir, prenant l'avion dès qu'une occasion se présente.
Le Procès
En 1960, le producteur Alexander Salkind propose à Welles d'adapter une œuvre moderne, mais libre de droit. Quelque temps auparavant, Michael Lindsay-Hogg, le (supposé) fils naturel de Welles, né en 1940 de Geraldine Fitzgerald, lui avait soumis l'idée d'adapter pour le théâtre Le Procès de Franz Kafka. Plus tard, les droits cinéma se révélent appartenir à un agent allemand. Toujours est-il que Salkind parvient à réunir 650 millions d'anciens francs avec un montage financier franco-italo-allemand et le tournage débute en mars 1962 à Zagreb (à défaut de Prague), en passant par la Gare d'Orsay, et se termine en juin. Welles revisite le roman, mais contourne quelque peu l'humour noir de l'auteur, innovant cependant en commandant à Alexandre Alexeïeff et Claire Parker une animation tirée de la Parabole de la Loi, incluse dans le texte originellement arrangé par Max Brod. Le film sort à Paris en décembre 1962 et décroche le Prix Méliès : {{lang}} est mal perçu par la critique anglo-saxonne, jugé baroque et déstabilisant, il s'achève sur un champignon atomique, Guerre froide oblige.
Dès la fin du tournage, Welles commence à vivre avec Oja Kodar, rencontrée à Zagreb. Dans la foulée, il continue d'être acteur pour les films des autres, et retenons de cette période sa rencontre avec Pasolini pour La Ricotta en 1963.
{{lang}}
{{lang}}, par Eduard von Grützner (1921).
Trois ans après le tournage du Procès, il réalise Chimes At Midnight ({{lang}}), qui est une refonte de plusieurs tragédies de Shakespeare qu'il avait écrites sous le nom de {{lang}}} en 1939 (Richard II, Henri IV, Henri V, Les Joyeuses Commères de Windsor) et en s'inspirant également des chroniques de Raphael Holinshed ; en février 1960, il reprit Five Kings au {{lang}} de Belfast qui fut pour Welles sa dernière performance sur les planches, mais qui servit en réalité de {{citation}} pour un film dont il avait déjà l'idée en tête. Le tournage se déroula entre septembre 1964 et avril 1965, le film étant tourné en Espagne et produit par Emiliano Piedra avec l'aide ultérieure d'Harry Saltzman, que Welles avait rencontré à Madrid pour un projet, l'adaptation de L'Île au trésor.
Le thème central du film est l'amitié trahie et la jeunesse perdue ; Orson Welles y incarne Sir John Falstaff. Sa passion dévorante pour le dramaturge anglais irradie ce film à la fois mélancolique et bouffon. Il considère qu'il s'agit de sa plus grande réussite : « Mon meilleur film est Falstaff, ensuite Les Amberson. {{lang}} est le complément, quarante ans plus tard, de ce Citizen Kane que j'ai tourné à l'aube de ma vie ». Le film est une coproduction hispano-suisse avec un tournage en anglais dans les environs de Barcelone entre l'hiver 1964 et le printemps 1965. Jeanne Moreau, déjà présente dans Le Procès y tient le rôle de Dolly, entourée d'une kyrielle d'acteurs issus du théâtre anglais dont John Gielgud. Présenté à Cannes en mai 1966, le film décrocha deux récompenses : le Prix du {{XXe}} Anniversaire du Festival du Film et le Prix de la Commission supérieure technique.
Une histoire immortelle
Durant l'automne 1966, Welles tourne pour la télévision française (ORTF), Une histoire immortelle ({{lang}}), tiré d'une nouvelle de Isak Dinesen intitulée L'éternelle histoire et pour la première fois en couleurs. Conçu à la façon d'une "miniature", ce film comprend Jeanne Moreau, Roger Coggio et Orson Welles dans le rôle de Mr Clay. Il ne sera diffusé que sur la deuxième chaîne le 24 mai 1968, passant relativement inaperçu eu égard aux événements en cours, mis à part une scène d'un érotisme assez poussé pour l'époque et {{refnec}}.
Quelques mois plus tard, Welles s'embarque pour le tournage de {{lang}} (1967-1969) - d'après {{lang}} (1963) de Charles Williams - sur un bateau, au large des côtes yougoslaves, avec, entre autres, Oja Kodar et Jeanne Moreau. Le film reste inachevé (cf. plus loin). Welles est alors à un nouveau tournant de sa carrière : il va faire face à une succession de projets avortés, dont le plus connu reste {{lang}} commencé en août 1970 avec ses amis John Huston et Peter Bogdanovich, et dont le tournage (chaotique) s'étend jusqu'en 1976. En 1969, CBS programme {{lang}} puis, en 1971, Orson Welles Bag, comprenant des extraits de {{lang}}. Mais le fisc américain confisque les financements reçus par Welles et le téléfilm reste inachevé. Cette année-là, Welles reçoit l'Oscar d'honneur pour l'ensemble de sa carrière. C'est sans doute au cours de 1970 qu'il décide de quitter l'Espagne, et de rentrer aux États-Unis. Il s'installe à Los Angeles avec Oja Kodar, tout en étant toujours officiellement marié avec Paola Mori.
Dernières années
{{...}} En quinze ans, Welles ne réussit à sortir que deux documentaires. Tout en continuant à jouer dans des films, à se montrer dans des émissions télévisées, à participer même à des publicités, il occupe l'essentiel de son temps à tenter de monter de nouveaux projets. Sa liaison avec Kodar est désormais publique. Elle participe avec lui à la plupart des films de fiction (des adaptations) que Welles, faute d'argent et de temps, ne parvient pas à terminer.
Vérités et Mensonges
Réalisé avec la complicité de François Reichenbach, Vérités et Mensonges ({{lang}}) est un essai documentaire, une réflexion sur le cinéma comme art de l'illusion, ainsi que sur les différentes techniques mises en œuvre pour y parvenir.
{{lang}}
Revenant sur le tournage d{{'}}Othello à partir de documents datant des années 1950-52, {{lang}} (1978), est réalisé pour la télévision allemande (Hellwig Productions), mais bénéficie d'une distribution en salles américaines en juin 1979, fait rare et dû à la personnalité et au prestige de son auteur. En 1982, Welles devient le président de la cérémonie des César. La même année le 23 février, le président François Mitterrand le nomme Commandeur de la Légion d'honneur, la plus haute distinction civile en France. Il meurt à 70 ans, le 10 octobre 1985 à Los Angeles des suites d'un arrêt cardiaque quelques heures après avoir participé à l'émission télévisée le Merv Griffin Show.
Conformément à ses dernières volontés, ses cendres ont été dispersées en Espagne, dans la finca Recreo de San Cayetano près de Ronda en Andalousie, qui appartenait à son ami, le torero Antonio Ordóñez.